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Maison Bernanos, de père en fils

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La Petite vermillon n'aura peut-être jamais mieux porté son nom. Grâce à Anne-Marie Adda (qui a signé nombre de couvertures du Dilettante), la collection de poche de la Table ronde, maison dirigée désormais par Alice Déon, brille de tous ses feux.
Mais l'illustratrice n'est pas seule responsable : le roman de Michel Bernanos qu'elle recouvre est lui-même une perle.
Peu connu du grand public pour des raisons que l'on va vite comprendre, Michel Bernanos est le quatrième des six enfants de son père, Georges et le seul qui sentit dans la littérature un chemin possible. Il choisit, c'est tout à son honneur, d'écrire sous les pseudonymes de Michel Talbert ou Michel Drowin et se trouva à peu de choses près inédit lorsqu'en 1964 la mort vient le réclamer et qu'il céda à ses instances. Il avait quarante-deux ans.
Grâce à Dominique de Roux, qui signa la postface historique intitulée "Dormez, vous serez heureux" (reprise ici), sa Montagne morte de la vie connut un sort enviable quant à elle : 6 éditions sous des enseignes différentes depuis 1964. C'est presque un record pour un écrivain méconnu et c'est la preuve, à n'en pas douter, de la qualité de son texte inspiré par un long séjour au Brésil.
Pour n'en dire pas trop, ce roman appartient à la catégorie des livres étranges où peut figurer La Ville incertaine de Paroutaud, Les Tortues de Masson, Le Fauteuil vert de Roger Rudigoz, et bien d'autres encore dont les noms n'atteignent pas, ou plus, aux frontons de la postérité. Et la postérité n'est pas infaillible, on le sait. En l'occurence elle se fourre le doigt dans l'oeil car le fantastique coloré de cette montagne-ci a de quoi surprendre. Elle ne rappelle à peu près rien de connu, hormis peut-être...
Mais nous vous laissons deviner. Sachez seulement que deux hommes sont sur une île rouge, inoccupée, troublante... Ajoutons seulement que le récit débute comme un roman maritime, qui pourrait être de Poe, et tout finit par... quelque chose qui évoque aussi ce cher Arthur Gordon Pym. Pour autant, n'allons pas vous inciter à calquer votre lecture sur la notre. Eh non.

Voilà, à nos yeux d'îlien, une lecture à ne pas rater, foi de préfet maritime.

N'attendez pas l'été...


Michel BERNANOS La Montagne morte de la vie. Préface de Stéphane Audeguy. Postface de Dominique de Roux. — Paris, La Table Ronde, 2008, 175 p. 7 euros

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Les Journaux autographiés (Louis Lemercier de Neuville)

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C'est en lisant l'Histoire du pastiche de Paul Aron que le nom de Lemercier de Neuville nous a ressauté à l'oeil et rappelé quelques notes et copies enfouies en nos caves. Bien sûr, nous consacrerons un billet au brillant essai de l'universitaire belge, dès qu'il sera complété de sa bibliographie prévue pour juin. Son sujet est passionnant, délicat, complexe et équivoque. Et il pose les bases d'une réflexion sur l'autorité, la notoriété, le jeu littéraire et la malice, voire la méchanceté, la diatribe, le pamphlet et autres sujets de conversation. Réflexion fort utile quoi qu'il en soit en nos temps fatigués à l'idée d'imaginer sans béquilles.
Reste que pour aujourd'hui, le menu c'est Louis Lemercier de Neuville (1830-1918), fameux montreur de marionnettes, chroniqueur, conteur, journaliste, etc. Bien aussi important que Charles Monselet, à notre humble avis d'îlien loin de tout, Lemercier de Neuville fut également lanceur de journaux comme il y a des lanceurs de couteaux.
En attendant les travaux d'un chercheur chenu de notre connaissance qui donnera tout ce qu'il faut savoir sur cet animal de plume polyvalent et capital, nous avons choisi de vous livrer (généreusement, merci, de rien) un fragment de La Muselière, Journal illustré de la Décadence intellectuelle qui vécut l'espace de treize semaines au premier semestre de l'an de grâce 1855.
De grâce, oui, puisque la gaîeté était de mise. Voilà qui relève pour nous d'un exotisme total ; notre triste aujourd'hui vaquant entre effroi et scandale, entre peur et angoisse, sans humour, sans élégance. Passons : malgré le soleil qui inonde ma case et le bruit des vagues, cela m'abat... Mais Lemercier de Neuville est là ! A vos rétines !
Spécialisé dans les "causeries aux cervelles creuses" de ses contemporains, Lemercier et une paire de ses pairs clamaient en ouverture « Nous ne payons pas nos places, et nous tâchons d’avoir l’œil partout », pour se fendre ensuite de goguenarderies et facéties diverses dont firent parfois les frais les comédiens du temps, mais aussi les rapins, les ratés, les politiques et les grandzauteurs.

Une curiosité à signaler : une rubrique intitulée "Joyeux Devis et menus propos" ressemble fort à un titre postérieur de Marc Stéphane, lequel inspirera ses "Propos subversifs" à René-Louis Doyon. C'est la grande chaîne des esprits malicieux.

L'esprit se perpétue, louons-les.

Nous donnerons ultérieurement la "Physiologie de l'incompris" paru dans la Muselière sous la signature d'un collaborateur de Lemercier, si nous parvenons à en déchiffrer le texte. Il faut dire, et j'allais oublier de le faire, que ce journal était autographié. D'où l'article qui suit.

Nous pouvons annoncer enfin une prochaine édition à part de la formidable Etude physiologie du rire de Lemercier de Neuville aux éditions Versant Libre. Publiée quarante-neuf avant celle d'Henri Bergson, cette brillante prose est sur un autre ton, je vous l'annonce.
Mais vous l'aviez deviné.

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Ribemont-Dessaignes n'est-il pas grand ?

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Excellente chose que ce Dada contre Barrès, "Réquisitoire prononcé au procès public à lui intenté par Dada et jugé le 13 mai 1921, rue Serpente, à Paris" de Georges Ribemont-Dessaignes, prononcé, puis composé et partiellement corrigé mais jamais publié dans le n° 21 de Littérature. On  […]

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L'Oeil bleu # 6 (Paul Verlaine, le groupe de l'Abbaye, Gustave Le Rouge, Jean Dayros, Hugues Rebell, etc.)

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Nous avons eu le grand tort de ne pas vous parler de la parution de la 5e livraison de L'Oeil bleu il y a quelques mois. Pour cause de lectures en cours, il est resté en déshérence et, de pile en pile, a fini dans la mauvaise, la maudite, celle qui loin des yeux parle peu, s'exprime encore moins et  […]

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Bibliographie lacunaire des éditions Gastein-Serge




Après les photos, les textes.
Le nom de Florian-Parmentier est bien connu des chercheurs qui tentent, après Michel Décaudin et ses prédécesseurs, d’entrevoir ce que fut vraiment le premier demi-XXe en dehors des escagasseries bien connues.
Nous avons donc gratté un peu pour nous apercevoir que ce Florian-Parmentier là fut non seulement critique, poète, auteur, théoricien, mais aussi éditeur sous deux marques distinctes. D’abord les éditions Gastein-Serge, dont voici le catalogue lacunaire, puis des éditions du Fauconnier dont vous aurez le catalogue un jour prochain.
S’il reste à en apprendre un peu sur les jeunes années de notre gaillard, nous pouvons avancer qu’il avait installé 17, rue Fontaine son domicile avant la guerre, et y avait entreposé le siège de ses éditions ; qu’il fut mobilisé à 35 ans le 6 août 1914 comme simple soldat et qu’il resta quarante-neuf mois au front. Il finit par être évacué pour intoxication par les gaz de combat deux mois avant la fin de la guerre. Il laissa le récit de son expérience sous le titre L’Ouragan, cité par Jean Norton Cru. Tous les champs de bataille de la Grande Guerre y figurent : Charleroi, Guise, la Marne, Reims, l’Aisne, la Woëvre, Berry-au-Bac, Verdun, la Somme, la Champagne …)
Voici, pour commencer, à quoi il était occupé avant et pendant-guerre, lui le revuiste, le pigiste, le correspondant d’une multitude de journaux tels que l‘Essor septentrional, la “Revue impulsionniste” (il en fut directeur), la Revue des Flandres (il en fut co-directeur), la Province, la Revue de l’Epoque (de Marcello-Fabri), le Courrier de France (directeur il en fut) ou encore Patria (secrétaire générale il a été) (1).
Tout ça dans le désordre, sachant qu’il appartint à cette vive génération, brisée menue par quelque algarade entre nations, qui apporta à la théorie littéraire une plus que pléthorique floraison d’ismes régénérateurs, ou non.
Pour sa part, Florian-Parmentier aura été l’impulsionniste en chef.

(A suivre : nous donnerons aussitôt que possible la bibliographie lacunaire des éditions du Fauconnier, ainsi que la liste des auteurs traités dans les trois volumes de la série Toutes les lyres, anthologie-critique illustrée).

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Mai 68, Pierre Peuchmaurd et la collection Contestation

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Nous vous avions promis un souvenir de Mai 1968, et c'est sous les espèces d'un livre, tè ! que nous vous le livrons là, derechef, sans plus tarder.Il s'agit en substance d'un petit livre oublié des présentes commémorations, rédigés durant l'été 1968 par un jeune homme de vingt ans, Pierre  […]

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Ne travaillez donc plus

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Confortablement installé à la terrasse d'un café de mon île, histoire de récolter le peu de calories solaires en circulation, il me fut donné d'assister, citoyen encore un peu abruti, à deux spectacles bien typique de notre humanité. D'abord la colère avec une algarade entre mâles — à distance, je  […]

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