Depuis 1896, on dégraisse !

L’an 1896 vit la parution du premier des cinq volumes des mémoires d’Henri Rochefort (c’est-à-dire le marquis Victor Henri de Rochefort-Luçay, 1831-1913) sous le titre Les Aventures de ma vie (Paris, Paul Dupont, 1896-1898). Replet, l’ensemble comprenait 1854 pages. Il faut dire que l’arsouille, qui avait vu du pays et des têtes, en avait à raconter.



En début d’année 2005, le Mercure de France, soucieux de nourrir sa collection « Le Temps retrouvé », publie, sous leur titre initial, ces souvenirs en… 450 pages. Aussi, on s’interroge : comment ont-ils pu tasser autant de texte en si peu de pages ?

Et l’éditeur, qui en rajoute, nous précise que Rochefort se lit comme un romancier ! De fait, Rochefort était une forte plume, c’est notoire. On lui doit notamment cet incipit célèbre : « La France contient, dit l‘Almanach impérial, trente-six millions de sujets sans compter les sujets de mécontentement. » (La Lanterne, n° 1, samedi 30 mai 1868). Bref, on comprend d’autant moins pourquoi, au lieu de fournir le texte intégral des cinq volumes in extenso, on s’est permis de sabrer dans cet écrit passionnant. En 1980, la maison Ramsay avait déjà fait le coup en 406 pages, mais elle prévenait dès la page de titre que son édition était abrégée.

Pour l’heure, Alfred Vallette (1858-1935), l’éditeur historique du Mercure de France, doit se retourner dans sa tombe. A la vue de ces « belles pages », il nous revient qu’en d’autres temps un vil éditeur commercial avait proposé des résumés de grands romans classiques. Vous souvenez-vous du tollé ? Évidemment, le Mercure de France n’est pas tombé aussi bas, n’est-ce pas.

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