Petite Bibliographie lacunaire de la Bibliothèque indépendante d'édition


Les lecteurs de l‘Encyclopédie des voyages imaginaires et de la science-fiction de Pierre Versins connaissent bien son nom : Jean de La Hire (1878-1956) s’est fait remarquer dans le registre de la SF naissante. Sa Roue fulgurante (Toulouse, Ombres, 1998, “Petite Bibliothèque Ombres”, 10, 52 €), par exemple, mérite qu’on s’y brûle car elle appartient indéniablement aux grands, bons et forts moments de la littérature populaire du siècle dernier.

La carrière de romancier de Jean de La Hire, détaillée dans ses grands et moins grandes lignes par Versins, n’apparaîtrait toutefois pas exhaustive si l’on négligeait la première tentation du bonhomme qui se fit éditeur afin de pouvoir prendre la plume. Si l’on en croit la Chronologie de l’édition de Pascal Fouché, c’est en novembre 1904 qu’Adolphe-Ferdinand Célestin d’Espie de La Hire fonde la Bibliothèque indépendante, le 15 pour être exact, une entreprise qu’il cède onze mois plus tard à Marguerite Weyrich. Celle-ci, dont nous ignorons tout, est peut-être la soeur de Marie Weyrich (1878-1925), mieux connues — façon de parler — sous le nom de Marie de La Hire, épouse de Jean.
C’est en tout cas au 17 de la rue Victor-Massé, après avoir déclaré l’adresse du 15, rue des Ursulines, à Paris qu’est installée la maison dont Jean de La Hire, puisque c’est sous son pseudonyme qu’il poursuit son oeuvre, et succède en juillet 1905 à Henri de Nousanne à la direction de la Librairie Universelle, poste qu’il quitte le 30 juin suivant. Son oeuvre d’écrivain l’appelle et il n’a pas tort de suivre ses sirènes puisqu’en 1908, il fait un tabac avec La Roue fulgurante, un succès qui va l’attacher définitivement au roman populaire, un registre dont il explorera tous les recoins : roman réaliste, militaire, de moeurs, historique, de cape et d’épée, policier, SF, aventures… D’abord considéré comme un nouveau Zola, il écrit (ou dicte) plus d’une centaine de romans, publiés pour la plupart en feuilletons dans la presse, puis dans les grandes collections populaires de Ferenczi, Rouff, Fayard, Tallandier, etc. Ses seules publications destinées à la jeunesse compilées totalisent près d’un millier de fascicules.
La success story connaît toutefois un cahot lorsque le 28 janvier 1941 Jean de La Hire est nommé commissaire-gérant des éditions Ferenczi “aryanisées” sous la marque d’Editions du Livre mderne en avril 1941. Mauvais gestionnaire ? Le 29 décembre 1941, il est relevé de ses fonctions mais cette année sous la férule nazie va lui coûter cher : Le 9 septembre 1944, il fait parti des éditeurs exclus par le Syndicat des Éditeurs, le 21 mai 1945 il est mis en détention préventive et la Commission nationale interprofessionnelle d’épuration lui interdit le 19 décembre 1945 de conserver des postes de responsabilité dans l’édition. Transféré pour raison de santé à l’hôpital de Château-la-Vallière. Il en profite pour prendre la fuite. Il sera condamné par contumace à dix ans de réclusion et à la dégradation nationale le 30 avril 1948 mais se constitue prisonnier le 3 décembre 1951. Quoiqu’il en soit sa carrière de feuilletonniste est foutue. L’auteur de Bombe-aux-nichons (!) est condamné à user de pseudonymes pour publier ses histoires de scouts. il est alors Edmond Cazal, Arsène Lefort, commandant Cazal, André Laumière, Alexandre Zorka ou John Vinegrover.
Son épouse, Marie de La Hire, bien moins fameuse, mérite qu’on s’y intéresse un peu. Proche camarade de Picabia, on la retrouve parmi les signataires de l’Œil cacodylate, elle signe un “Croquis dada” dans 391 (n° 14, novembre 1920, p. 7) et appartient à ce monde qui bouge et qui remue. Outre son roman, Modèle nu, où figurent, probablement masqués, quelques-uns des dada et autres fantasques de l’époque (il faudra y regarder de près) et une floppée de récits scouts pondus sous l’influence de son époux, ou pour lui venir en aide — un atelier de La Hire ? —, Marie de La Hire a publié un essai sur Francis Picabia (Povolozky-La Cible, 1920) qui fait encore recette et les quelques poèmes publiés à l’enseigne de la Bibliothèque indépendante que l’on verra plus bas. Bref, le grand écart esthétique. Pourtant, on se plaît à rêver d’indices qui pourraient nous conduire à retrouver Marie de La Hire en sa vérité… La trouver là, ci-dessous, dans le catalogue de la maison familiale qui sent la floralie, la colonie et le compte d’auteur ne peut qu’ajouter à la confusion. Même si s’y rencontre aussi le nom de Jacques Hébertot…



CATALOGUE

La Revue des lettres. Mensuelle puis, en 1907, trimestrielle. Novembre 1904 (n° 1)-août 1907 (?). Direction : Marie d’Espié (Marie de La Hire) et Paul Yaki. Editions Adolphe d’Espié. 15, rue des Ursulines (Paris 5e). En 1907, l’administration de la publication sera logée au 17, rue Victor-Massé (Paris 9e) et aura pour gérant A. Bertègue. Collaborateurs : Paul Adam, Paul André, Fernand Aubier, Albert Besnard, Paul Besnard, Henry Bordeaux, Léon Bocquet, Georges Casella, Emmanuel Deslbousquet, Adolphe d’Espié, Jean de La Hire (sic), Georges Lemoyne, Camille Mauclair, Alphonse Millot, Jacques Mortagne, Lucien d’Ornans, Louis Payen, Auguste Rodin, J.-H. Rosny, Valentine de Saint-Point, Louis Santenac, Pierre Talbot, Jacques Vautrin, Renée Vivien, Marie Weyrich, Paul Yaki.

AYMARD (Camille) La Profession du crime, étude sociale. Thèse pour le doctorat soutenue le 23 janvier à la Faculté de droit de l’université de Paris. — Paris, A. d’Espie, 1906, 381 p.

ANONYME Confessions d’une jeune femme. — Paris, Bibliothèque indépendante, 1906, 242 p.

BEAUCLERCQ (Alexandre) Omnipotence brisée. — Paris, Bibliothèque indépendante, 1906, 255 p.

BESNARD (Paul) La Pierre de jade. — Paris, Bibliothèque indépendante, 1907, 182 p. “Collection nouvelle de romans inédits à fr. 50”.
Monseigneur Rouballeau, roman. — Manque à la BnF.
Moblot de Coumiers, impressions militaires d’un civil, 1870…, roman. Précédé d’une étude sur Paul Besnard par Jean de La Hire. — Paris, Bibliothèque indépendante d’édition, 1908, XXIV-200 p.

BRANSIET (Maurice) Raivo, amours malgaches. — Manque à la BnF.

BRUNETTE (Paul) Impressions fugitives, poèmes. Avec une couverture illustrée de Pierre Berthoud. — Paris, Bibliothèque indépendante d’édition, 1908, 186 p.

CANDIDE (C.) Les Aiguillons de Vénus, contes légers. — Paris, Manque à la BnF.

CLAVIE (Marcel) La Camarade, comédie en 1 acte, en prose, représentée pour la première fois, à Paris, au Théâtre en liberté (Nouveau Théâtre populaire), le 22 janvier 1905. — Paris, Bibliothèque indépendante, 1905, 31 p. Collection ″Athéné″.

CLO (Clotilde de Loubens de Verdalle, comtesse ) L’Inévitable, roman. — Manque à la BnF. Ce roman connaîtra une réédition en 1933 dans la collection “Stella”.

COUPEY (Augusta) Le Serf de la princesse Latone, roman. — Manque à la BnF. Réédition du livre publié par Didier en 1877 avec ce sous-titre : “Drame de l’émancipation russe”.

DAUREL (Jean) L’Homme aux pieds palmés, roman. — Manque à la BnF.
Le Maître de la Vie, roman d’aventures. — Paris, Bibliothèque indépendante d’édition, 1908, 353 p.

FAUCHOIS (René) L’Exode, trois actes. — Ce titre qui apparaît à l’extrait du catalogue publié en quatrième de couverture du roman de Marie de La Hire, Modèle nu (1908), semble avoir paru ailleurs qu’à la Bibliothèque indépendante d’édition. Voici ce que donne la catalogue de la BnF : L’Exode (Paris, Nouveau-Théâtre, 24 mars 1904) Paris, L’Emancipatrice, 1904, 167 p. Le même catalogue de la même BnF ne donne aucune autre édition.

FROBERT (Pierre) La Fille de Triboulet, roman. — Paris, Bibliothèque indépendante d’édition, (1909), 292 p.

HEBERTOT (Jacques) Le Sonnet, son évolution à travers les âges et les pays. — Paris, Bibliothèque indépendante, 1905, 32 p. “Collection d’études littéraires”.

JULLIEN (J.-M.) Le Livre d’une mère, poèmes. — Paris, Bibliothèque indépendante d’édition, (1907), 52 p.

LA HIRE (Jean de) Vengeance d’Amoureuses, roman. Illustrations de Marie de la Hire. — Paris, A. d’Espie, 1905, 181 p. Collection “Astarté”.
Trois Parisiennes, roman. — Paris, Bibliothèque indépendante, 1906, 270 p. “Collection nouvelle de romans inédits à fr. 50”.
Ménage d’artiste. Willy et Colette, étude biographique et critique. — Paris, A. d’Espie, 6 p.-(26) f. de pl.
L’Homme et la société. Les Vipères, moeurs de province. — Paris, Bibliothèque indépendante, 1907, 329 p.

LA HIRE (Marie de) Modèle nu. — Paris, Bibliothèque indépendante d’édition, 1908 (a. i. 22 mai), 315 p.

LALLI (Roger) La Muse parisienne, poèmes. — Paris, Bibliothèque indépendante d’édition, 1906, 36 p.

LOUIS-BOSCH (Claire) Les Veillées poétiques, poèmes. — Manque à la BnF.

MARANDET (Amédée) Éternelle volupté (l’ineffaçable), roman. — (S. l. ?), Bibliothèque indépendante d’édition, 1907, 277 p.
Le Diner Loupiau, comédie en 1 acte. — Paris, bibliothèque indépendante d’éd., (s. d.), 19 p. La première eut lieu au théâtre de la Gaîté, le 12 novembre 1895.

MONTOUSSE (Hortense) Les Caprices, fantaisies littéraires. Avec un liminaire de Jean de La Hire . — Paris, Bibliothèque indépendante, 1906, 214 p.

ONIOT (Richard d’) La Conversion d’une Parisienne, roman. — Paris, Bibliothèque indépendante d’édition, 1908, 288 p.

PHILIPPE (Alex.) L’Évolution sociale par la dissolution, la révision et une constitution nouvelle… Édition de l’auteur. — Paris, Bibliothèque indépendante, (1906), 98 p.

PRIS (commandant Edmond) Trente ans de servitude militaire, roman d’après nature. — Paris, Bibliothèque indépendante d’édition, 1906, 325 p.

ROCHON (Jean) Le Merle d’or, contes réalistes. — Paris, Bibliothèque indépendante, 1907, 208 p.

ROUSSEAU (Jean-Jacques) Les Rêveries d’un promeneur solitaire. — Manque à la BnF.

SALORGES (comtesse de) Fanchon la jolie, roman. — Paris, A. d’Espie, 1905, 125 p. Collection “Astarté”.

SOULIE (Léon) Au coeur de l’ombre, poèmes. — Paris, A. d’Espie, 1905, 168 p. Collection “Cyparis”.

TOLSTOÏ (comte Léon) La Fin de notre ère (à propos de la révolution en Russie). Traduit du manuscrit original par J.-W. Bienstock. — Paris, Bibliothèque indépendante d’édition, 1906, 64 p.

TROHEL (Jules) Feuilles intimes, poèmes. — Paris, A. d’Espie, 1905, II-51 p. Collection “Cyparis”.
La Force de la race, épisode dramatique en 1 acte et en vers. — Paris, Bibliothèque indépendante d’édition, 1907, 33 p.

TOURNIER (Gaston) Les Voix du Coeur, poèmes. — Paris, A. d’Espie, 1905, 141 p. Collection “Cyparis”.

VALTAT (Georges) Cassé ! Avec un portrait de l’auteur. — Paris, Bibliothèque indépendante d’édition, 1907, 276 p. “Collection nouvelle de romans inédits à fr. 50”.
Pour l’enfant, comédie dramatique en 2 actes et en prose. Préface de M. Jean de La Hire. (Suivie de la nouvelle Là-bas, à la mémoire du commandant Moussay). — Paris, Bibliothèque indépendante d’édition, (1908), 184 p.

VARINOT (lieutenant Jean-Baptiste-Philibert) La Paix et la guerre, solution unique et rationnelle du problème. — Paris, Bibliothèque indépendante d’édition, 1905, 35 p.

VERNOU (Pierre) Le Choix d’une maîtresse. — Paris, Bibliothèque indépendante, “Collection nouvelle de romans inédits à fr. 50”. Manque à la BnF.

WEYRICH (Marie) Les Jardins du soir, poèmes. — Manque à la BnF.

WILLEMS (Raphaëlle) Jetée du nid, roman. — Manque à la BnF.

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