Pohol, histoire de 1829 (I)

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Littérature romantique


Pohol, histoire de 1829

I
L'idée noire.

Il était grand, pâle et maigre ; il avait un front large et osseux, des cheveux noirs, des yeux noirs ; — c'est bien.
Pour le moral... sérieux comme un croque-mort ; triste, sombre, morne. — Il croyait en Dieu, en la Vierge mère, au Diable.
Lorsque ses camarades riaient, couraient ou devisaient joyeusement... lui, croisait les bras, penchait le front, et se promenait à pas lents le long du mur gris de la cour, — rêvant à l'Enfer, aux laves brûlantes, aux démons hideux ; — les cris des damnés râlaient à son oreille et le rire des démons claquait comme le tarabat des cloîtres... puis, quand son imagination se dilatait éperdue dans cet affreux cauchemar, une horrible main sèche et onglue lui montrait la place qu'il devait occuper là.
Alors ses cheveux se dressaient et se tordaient sur sa tête ; il fermait les yeux et passait la main sur son front luisant d'une sueur froide. — L'idée était toujours là ; c'était une fille d'enfer épouvantable, désespérante, qui toujours le suivait, l'étreignait, le torturait ; brunissait ses rêves la nuit, accroupie dans toutes ses pensées.... et qui, fixe, impitoyable, toujours lui criait à l'oreille : "Damné !" Et pourtant il priait Dieu ; il se signait au front avec de l'eau bénite ; il priait la Vierge mère, se frappait la poitrine, pleurait.
Comme il venait de terminer sa troisième année de théologie, et qu'il avait trois ans à vivre encore avant que de pouvoir être ordonné prêtre de Dieu, — il quitta le séminaire. Sa noire idée sortit avec lui...



(A suivre.)

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