Eloge du maquereau (René-Louis Doyon reparaît !)

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A l'occasion de la réédition le 9 octobre prochain du fameux Eloge du Maquereau de René-Louis Doyon (1885-1966) à l'enseigne des éditions Serge Safran, voici quelques définitions gracieusement offertes par l'Alamblog.
Serviteur.


La Curne de Sainte Palaye
1. Maquereau, Maquerel, Maqueriau. [Poisson : " Tout le maquerel et tout le harenc qui vient à Paris doit estre vendus à conte. " (Liv. des Mét. 270.) - " Et quand il (Jean sans Terre) vint loing en meir, si le (Arthur) rua enz aus maqueriaus pour avoir sa terre. " (Mén. de Reims, § 245.)
« ... Quant des poys demande,
On me fait feves ou pourreaulx ;
Se harens vueil, j'ay maqueraux. » (Desch. f. 493.)
" Maquereau bastard, " espèce de poisson marin ; en latin trachurus. (Cotgr.)

Furetière
MAQUEREAU. subst. masc. Poisson de mer qu'on pesche aux mois d'Avril & de May. Il est long & menu, tacheté de bleu & de noir. On en mange de frais & de Salé. L'eau dans laquelle on fait cuire les maquereaux est fort lumineuse quand elle est remuée. En Latin scomber. Ce mot vient à maculis, parce qu'il est fort tacheté. Quelques-Autheurs modernes l'ont appellé maquerellus.

Académie française (XVIIIe)
MAQUEREAU. s. m. Poisson de mer sans écailles, marqueté sur le dos, & qu'on pêche au printemps. Maquereau frais. Maquereau salé.
On appelle Maquereau, Certaines taches qui viennent aux jambes, quand on s'est chauffé de trop près.

Littré
1. MAQUEREAU (ma-ke-rô), s. m.
1° Poisson de mer à plusieurs fausses nageoires sur la queue et tacheté de diverses couleurs (scomber vulgaris, scomber scombrus, L.), dit aussi auriol, aurion sur les côtes de la Méditerranée ; il arrive en grandes troupes annuellement des contrées du nord. Le nom de groseilles à maquereau vient de l'usage d'employer ces fruits comme condiment de ce poisson.
Maquereau chevillé, maquereau qui cesse d'être plein après avoir déposé ses oeufs, et dont la chair a perdu une grande partie de ses qualités.
Maquereau bâtard, le saurel, poisson huileux des côtes de Normandie et de Picardie (caranx trachurus).
2° Taches qui viennent aux jambes quand on s'est chauffé de trop près (éphélides ignéales).
HISTORIQUE :
XIIIe s. Tout le maquerel et tout le harenc qui vient à Paris doit estre vendus à conte, Liv. des mét. 270.
XIVe s. Aiez un maquerel frais et decoupez par tronçons, Ménagier, II, 5. Se harens vueil je veux, j'ai maquereaux, EUST. DESCH. Miroir de mariage, p. 12.
XVIe s. Tes egnes aines et tes gigoteaux Sont marquetez de maquereaux, BAÏF, Passetemps, III, à Claudine.
ÉTYMOLOGIE : Pic. macrieu ; bourg. maiquereà, le maquereau, macria, la groseille à maquereau. On trouve le flamand makreel, le danois makrel, l'anglais mackrell ; mais les germanistes disent que ces mots viennent du français. On donne la même origine au kimry macrell. On regarde maquereau comme formé du latin macula, tache, à cause des taches que présente ce poisson ; et alors maquereau serait pour maclereau. On trouve dans le champenois le mot maquet, maquereau, et Scheler s'en autorise pour rattacher maquereau à maca, radical hypothétique du latin macula, radical qu'il trouve dans macquer. En définitive, l'origine du mot maquereau reste douteuse.

Dictionnaire de la langue verte d'Alfred DELVAU, 1883
MAQUEREAU. s.m. Souteneur de filles, ou plutôt Soutenu de filles.
Il est regrettable que M. Francisque Michel n'ait pas cru devoir éclairer de ses lumières philologiques les ténèbres opaques de ce mot, aussi intéressant que tant d'autres auxquels il a consacré des pages entières de commentaires. Pour un homme de son érudition, l'étymologie eût été facile à trouver sans doute, et les ignorants comme moi n'en seraient pas réduits à la conjecturer.
Il y a longtemps qu'on emploie cette expression ; les documents littéraires dans lesquels on la rencontre sont nombreux et anciens déjà ; mais quel auteur, prosateur ou poète, l'a employée le premier et pourquoi l'a-t-il employée ? Est-ce une corruption du moechus d'Horace (homme qui vit avec les courtisanes, moecha, fille) ? Est-ce le grec, conservé en français avec sa prononciation originelle et son sens natif (grand, fort) par quelque helléniste en bonne humeur ? Est-ce une contraction anagrammatisée ou une métathèse du vieux français marcou (matou, mâle) ? Est-ce enfin purement et simplement une allusion aux habitudes qu'ont eues de tout temps les souteneurs de filles de se réunir par bandes dans des cabarets ad hoc, par exemple les tapis-francs de la Cité et d'ailleurs, comme les maquereaux par troupes, par bancs, dans les mers du Nord ? Je l'ignore, - et c'est précisément pour cela que je voudrais le savoir ; aussi attendrai-je avec impatience et ouvrirai-je avec curiosité la prochaine édition des Études de philologie de M. Francisque Michel. Au XVIIIe siècle, on disait Croc de billard, et tout simplement Croc, - par aphérèse.
MAQUEREAUTAGE. s.m. Exploitation de la femme qui exploite elle-même les hommes ; maquignonnage. On prononce Macrotage.
MAQUEREAUTER. v.a. et n. Vivre aux dépens des femmes qui ne vivent elles-mêmes qu'aux dépens des hommes. On prononce Macroter.
MAQUEREAUTER UNE AFFAIRE. Intriguer pour la faire réussir.
MAQUEREAUTIN. s.m. Apprenti débauché, jeune maquereau. On prononce Macrotin.

L'Argot fin de siècle de Charles VIRMAÎTRE, 1894
MAQUEREAU. Les uns croient que ce mot vient de l'hébreu machar, qui signifie vendre, parce que c'est le métier de ces sortes de gens de vendre les faveurs des filles.
D'autres font dériver cette expression d'aquarius ou d'aquariolas, parce que chez les Romains les porteurs d'eau étaient les intermédiaires de la prostitution, d'où nous avons fait, en ajoutant la lettre M. Maquariolus, et que de là s'est formé le nom de maquereau.
D'autres encore affirment que ce mot vient du latin macalarellus, parce que dans les anciennes comédies, à Rome, les proxénètes de la débauche portaient des habits bizarres, et ils étayent leur opinion sur ce que ce nom n'a été donné à l'un de nos poissons de mer que parce qu'il est mélangé de plusieurs couleurs dans le dos (Dessessart, Dictionnaire de police, Bulenger opuscul.) Quoi qu'il en soit, la signification du mot maquereau est de vivre aux dépens de quelqu'un, mais l'expression s'applique plus généralement à ceux qui vivent de la prostitution des femmes.
Souteneur, qui vit des filles publiques, ou mari qui laisse sa femme se prostituer, lequel est un maquereau légitime.




René-Louis Doyon Éloge du maquereau. Édition présentée et annotée par le Préfet maritime. - Paris, Serge Safran éditeur, 160 pages, 8,50 €

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